Comme dans la plupart la plupart des cas, la filmographie de Cédric Klapish n’est pas une suite d’éléments distinct et indépendants les uns des autres, sans rapports et sans continuité. En plus d’une évolution dans les thématiques et les sujets souvent réminiscences, les personnages incarnent une avancée d’un film à l’autre et il n’est pas rare qu’un même acteur joue pratiquement le même personnage à une période différente de sa vie. C’est le cas pour le plus évident des exemples : Romain Duris. Klapish étant un cinéaste de son temps, des différents temps, voyons quels personnages incarnent ces époques.
C’est probablement la tranche d’âge traité le plus brièvement par Klapisch puisque le Péril jeune est le seul film à s’axer principalement dessus. Cela s’explique peut-être par ce qui fait sa principale force : contourner le préjugé qui tend à définir ce qu’est la jeunesse pour le contourner en parlant de ce qui lui fait écho : le souvenir, la liberté et la folie.
Tomasi (Romain Duris), personnage est l’exemple phare de cette période, presque l’incarnation de la jeunesse elle-même. C’est l’actant majeur du péril jeune, l’un des premiers films de Klapisch. L’histoire se déroule quelques années après le bac : Momo, Léon, Bruno et Alain se réunissent à l’hôpital pour soutenir leur copine Sophie. Le papa, c’était Tomasi, mort un mois plus tôt. Ensembles, ils se remémorent les souvenirs, les anecdotes. C’était les années 70 et la fin du rêves. Ces années ils les ont vécues à travers les cours, les filles, les manifs, la drogue les conneries en tous genre. Plus qu’un film, le Péril Jeune est une ode à la jeunesse et Tomasi, l’incarnation de cette jeunesse, folle, authentique, brute, sans limite, perdue et libre ; une jeunesse morte et à la fois éternelle.
Alain (Vincent Elbaz) dans le péril jeune est une figure du bon pote, sportif, un peu macho. Les délires un peu extrêmes tels que la drogue ou les réunion dans les squat parisiens ne lui réussissent pas trop. A la différence de Tomasi, son grain de folie n’est pas assez prononcé pour le couper de l’avenir à quelques temps de la sentence du bac. C’est d’ailleurs le cas pour ses potes : Momo (Nicolas Koretzky), Léon (Joachim Lombard) et Bruno.(Julien Lambroschini) qui ont chacun un métier et un cadre de vie bien définis à l’âge adulte lors de leur retrouvaille à l’hôpital.
C’est la période majeur traitée à ce jour par les films de Klapish de Chacun cherche son chat aux Poupées Russes en passant par Peut-être et L’auberge Espagnole, son plus emblématique.
C’est probablement le personnage de Garence Clavel : Chloé, qui entame cette période dans chacun cherche son chat. Le film retrace son errance à travers un univers urbain plein de charmes mais fermé sur lui-même. Il renvoie à ce personnage en quête d’ouverture, perdue dans une impasse. Elle est en plein désarroi, celui de la période 20/25 ans, perdue dans un compromis arbitraire entre jeunesse et vie adulte.
Xavier (Romain Duris). Ce n’est pas un hasard si Romain Duris incarne ce personnage encore perdu quelque part entre jeunesse et vie adulte. Il est encore à cet âge intermédiaire où le rêve est encore à construire, encore à improviser, à imposer à la vie adulte qui arrive vite, très vite. Il répond à la problématique de Tomasi. Ce dernier incarnait une jeunesse qui comme le rêve était absolu et indépendant de la réalité comme la jeunesse de la vie adulte, particularité qui contraint les deux mondes à rester séparés l’un de l’autre. Pour Xavier, dans l’Auberge Espagnole et les Poupées Russes le dilemme au fond, c’est grandir ou mourir. Le lien avec Tomasi est là ; c’est Duris qui l’incarne. La problématique est alors la suivante : trouver un subterfuge, une solution à ce problème binaire : grandir ou mourir en trouvant une solution pour passer à la vie adulte tout en faisant vivre le rêve.
Ainsi, Romain Duris acquiert une nouveau statut dans les films de Cédric Klapisch puisqu’il crée au fur et à mesure des films une continuité logique. Bien sûr cette continuité est d’ordre schématique et poétique. Elle n’est pas chronologique puisque d’un film à l’autre la situation varie plus ou moins. Qui plus est le personnage de Tomasi meurt ce qui ne permet pas d’établir une continuité biographique de son personnage, probablement d’un intérêt moindre. Cela permet à ses personnage d’acquérir au contraire un statut d’emblèmes, presque des icônes de leur temps.
Ainsi quelques apparitions renforcent cette idée de continuité entre les films. Duris apparaît dans Chacun cherche son chat mais à l’arrière plan, presque au sein même du décor puisqu’il incarne un joueur de batterie croisant de façon anecdotique le destin de Chloé. C’est une idée majeur dans cette filmographie : des éléments qui sont là et qui d’un film à l’autre passe du second au premier plan et vice verça, passant du statut de sujet à décor et du décor à sujet.
Peut-être fait figure d’exception dans la continuité logique des personnages de Duris puisque le personnage de Arthur est d ans un cadre de vie bien définis. Il vit dans un appartement avec sa copine et pense à faire des enfants ou plutôt à ne pas en faire, c’est le sujet même du film. Néanmoins, le lien est fait avec l’avenir puisque Peut-être est un film d’anticipation dans tous les sens du terme. La thématique de l’entre deux est d’ailleurs incarnée par l’univers visuel induit par les conditions du film ce qui correspond aux attentes de Klapisch. Plus qu’une continuité, Peut-être est donc une fable à part, il traite de la relation de père à fils comme en témoigne le duo entre Duris, père et Belmondo qui par un retournement joyeusement loufoque joue le rôle du fils.
Tout comme Duris, Zinedine Zoualem est récurent d’un film à l’autre du Aziz de Riens du tout jusqu’au futur Paris. Toujours personnage secondaire, sa présence est néanmoins indissociable du travail de l’univers du cinéaste chez qui le sujet est présent aussi bien chez le personnage principal qu’à l’arrière plan. Son principal personnage est celui de Djamel dans Chacun cherche son chat. Il joue la rôle d’un simple d’esprit plus compliqué que le préjugé que l’on peut s’en faire.
Copywrong 2007